samedi 03 décembre 2016 à 17h52

Par un communiqué de presse commun envoyé le 25 novembre dernier vers 19h00, les trois grands organisateurs de courses cyclistes :
- Amaury Sport Organisation (A.S.O., organisateur notamment du Tour de France, de Paris-Nice, Paris-Roubaix, le Critérium du Dauphiné et Paris-Tours),

- RCS Sport (l'organisateur italien de notamment le Giro d'Italia ou Tour d'Italie, de Tirreno Adriatico, Milan Sanremo ou encore Il Lombardia ou le Tour de Lombardie) et

- Flanders Classics (l'organisateur belge de nombreuses classiques : Omloop Het Nieuwsblad, Dwars door Vlaanderen [A travers la Flandre], Gent-Wevelgem [Gand-Wevelgem], Ronde van Vlaanderen [Tour des Flandres], Scheldeprijs [Grand Prix l'Escaut] et le Brabantse Pijl [la Flèche Brabançonne])

annonçaient d'une voix commune que le nombre de coureurs sur leurs courses serait réduit sur l'ensemble de leurs épreuves.

Mais est-ce aussi simple ?!

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Le communiqué de presse des organisateurs

Ces trois organisateurs ont donc diffusé un communiqué de presse en français, anglais et italien (RCS Sport n'ayant diffusé que la version italienne), annonçant que suite à l'assemblée générale de l'AIOCC (Association Internationale des Organisateurs de Courses Cyclistes), ces trois organisateurs ont décidé de réduire le nombre de coureurs au départ de leurs courses : de 9 à 8 pour les Grands Tours (Giro d'Italia, Tour de France et potentiellement également la Vuelta a España mais ce n'est pas très clair car même si A.S.O. est majoritaire le nom de son organisateur, Unipublic, ne figure pas dans le communiqué) et de 8 à 7 pour les autres épreuves.

Selon les organisateurs, cette décision répond à un double objectif :
> améliorer les conditions de sécurité des coureurs au sein d'un peloton moins imposant sur des routes de plus en plus équipées de mobilier urbain
> rendre plus compliqué le verrouillage de la course et donner davantage de souffle sportif aux épreuves pour la plus grande joie des fans de cyclisme

Christian PrudhommeDans une interview avec l'AFP, Christian Prudhomme, directeur du cyclisme chez A.S.O., a précisé ce double objectif en déclarant : L'impératif de sécurité s'impose à nous. Par exemple, nous allons doubler dans le final des étapes de plaine les barrières inclinées qui présentent de meilleures garanties pour les coureurs et nous allons renoncer à l'arche gonflable de la flamme rouge. C'est un ensemble de mesures dans lequel la réduction de nombre de coureurs est évidemment un élément important.

La flamme rougeAu passage on apprend donc que Vittel perdra son support de publicité que formait l'arche de la flamme rouge (ou en tout cas qu'il change de forme), suite à l'incident qui avait eu lieu dans le final de la 7ème étape du Tour de France 2016 quand Adam Yates (Orica-BikeExchange) s'est retrouvé à terre alors qu'il était lancé dans sa course au maillot blanc de meilleur jeune (maillot qu'il a finalement bien conservé en fin du Tour).

Le communiqué finit par une remarque qui indique simplement que cette décision prendra effet dès la saison 2017, le nombre des équipes engagées restant évidemment inchangé.

Mais visiblement ce n'est pas si simple que cela ...

Les réactions des équipes

En effet, toutes les équipes ne sont pas d'accord avec cette réduction de nombre de coureurs comme elles l'avaient fait comprendre par le passé quand ce sujet avait été discuté.

Suite à l'annonce communce des trois organisateurs, plusieurs équipes ont réagi par la voix de leur manager :
  • Patrick Lefévère, Etixx-QuickStep - le manager de l'équipe belge est clairement opposé à cette décision, comme on a pu le lire dans le quotidien Het Nieuwsblad : Je suis catégoriquement contre. Personne n'a été consulté, ni les équipes ni les syndicats de coureurs. Ils devraient commencer par trouver des routes plus sûres, plutôt que d'utiliser de vieilles routes de charrette. Et s'occuper de la sécurité, pas comme sur le Tour de Suisse par exemple avec cette ligne d'arrivée qui se trouvait cinquante mètres après un virage serré.

    Il précise par ailleurs que le nombre de coureurs obligatoire pour une équipe WorldTour perd également tout son sens avec cette mesure : Pourquoi devrions-nous encore prendre 30 coureurs par équipe en 2018 ? Pour qu'ensuite on puisse continuer avec cinq coureurs en moins par équipe. Il y aura une centaine de coureurs supplémentaires à la rue fin 2017. Et vingt-cinq autres membres du staff parce qu'ils ne seront plus nécessaires.

    Par ailleurs, en réponse à un tweet de Renaat Schotte, un journaliste flamand qui commente le cyclisme sur Sporza (la rubrique sport de la chaîne publique flamande) qui demandait quelle était la preuve scientifique comme quoi un coureur de moins par équipe contribue à la sécurité, Patrick Lefevere ne s'est pas retenu de donner son avis non plus :

    Ajoute quelques ronds-points, des montées pentues, des chemins de terre, des arrivées compliquées en plein centre-ville et des étapes de 250 km .. Ils n'ont juste rien compris.
  • Marc MadiotMarc Madiot, FDJ - le manager de l'équipe au trèfle et également président de la Ligue Nationale de Cyclisme de son côté est plutôt en faveur de la mesure ou veut en tout cas lui donner une chance. En effet, à l'AFP Madiot a répondu : Pourquoi ne pas essayer ? C'est une option pour rendre leur intérêt aux courses, comme pourrait l'être l'interdiction en course des oreillettes ou capteurs de puissance. Si les courses sont attractives avec 8 coureurs, partons pour 8 coureurs. Si elles le sont avec 6, partons pour 6.
  • Jonathan VaughtersJonathan Vaughters, le manager de l'équipe Cannondale-Drapac, enfin a fait connaître son avis négatif sur cette décision, avis qu'il partage donc avec Patrick Lefevere tout comme de nombreux autres managers d'équipes.

    Très actif sur Twitter, le manager américain s'est fendu de deux tweets, le premier dans lequel il montrait une copie d'écran du communiqué de presse des trois organisateurs, envoyé par A.S.O., en disant : C'est tellement cool de la part d'A.S.O. de prévenir les équipes et les coureurs de leur décision unilatérale de réduire la taille des équipes 2 mois avant le début de la saison.

    Dans son deuxième tweet, il précise qu'il n'est pas contre le concept d'équipes plus petites mais qu'il n'apprécie pas d'en être informé une fois qu'on a bien avancé sur notre planning et nos effectifs.

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L'UCI rappelle à l'ordre

Dans un communiqué le lendemain du communiqué commun des trois organisateurs, l'UCI (Union Cycliste Internationale) a souhaité préciser que cette décision ne peut être prise unilatéralement par les organisateurs de courses.

En effet, l'UCI indique dans son communiqué que bien qu'une possible réduction de la taille des équipes puisse refléter la position de certaines parties prenantes, (...), tout changement de règlement régissant le cyclisme sur route professionnel masculin doit être approuvé par le Conseil du Cyclisme Professionnel (CCP), dans lequel les organisateurs de courses sont pleinement représentés. Ce point avait été abordé lors de la dernière réunion du CCP en novembre 2016, et il avait été décidé d'étudier en détails au cours des mois à venir les implications d'une telle réduction, sans procéder au moindre changement en 2017.

Ce qu'en dit le règlement

Néanmoins, la réaction de l'UCI semble plutôt être basée sur son envie de vouloir avoir le dernier mot à dire dans ce qu'il se passe dans le cyclisme que sur des articles précis du règlement qui organise le sport.

En effet, dans l'article 2.2.003 il est écrit précisément a propos du nombre de coureurs par équipe : Le nombre de coureurs titulaires par équipe est fixé par l'organisateur entre 4 au minimum et 8 au maximum, 9 pour les Grands Tours. L'organisateur doit indiquer dans le programme - guide technique et dans le bulletin d'engagement le nombre de coureurs
titulaires par équipe pour son épreuve. Ce nombre doit être égal pour toutes les équipes.


Sur la base de ce paragraphe, on pourrait donc conclure qu'il n'y est nullement précisé que le nombre minimum serait de 9 pour les Grands Tours et 8 pour les autres courses, ce sont les nombres maximum pour ces deux types de courses. Les organisateurs semblent donc avoir toute la liberté à procéder à cette réduction du nombre de coureurs, sans que pour cela une modification du règlement soit nécessaire comme le semble l'indiquer l'UCI.

Néanmoins, il figure une précision dans ce même article concernant les courses UCI WorldTour qui dit que le nombre de coureurs titulaires par équipe (y) est de 9 pour les Grands Tours et de 8 pour les autres épreuves mais qu'il est toutefois possible, moyennant l'accord préalable du Conseil du Cyclisme Professionnel, (que) l'organisateur peut fixer le nombre de coureurs titulaires par équipe à 7 et qu'il doit pour cela adresser sa demande au Conseil du Cyclisme Professionnel au plus tard au 1er janvier de l'année de l'épreuve.

Un petit hic donc pour les épreuves UCI WorldTour de ces organisateurs, mais toujours pas besoin de toucher aux règlements qui sont parfaitement en phase avec la volonté des organisateurs. Les organisateurs sont d'ailleurs toujours dans les délais pour faire la demande au CCP ! Par ailleurs, comme on le sait, A.S.O. n'est pas à ça près pour retirer ses courses de l'UCI WorldTour pour parvenir à ses besoins ...

Et vous, que pensez-vous de cette évolution ??

Pour rappel, voici les courses concernées par ordre chronologique (avec entre parenthèses l'organisateur et l'appartenance ou non au UCI WorldTour ; pour rappel : pour celles hors UCI WorldTour, le passage à un coureur de moins peut se faire sans aucune validation de l'UCI ou plus précisément du CCP) :
A noter, le Critérium International, prévu au calendrier UCI Europe Tour les 25 et 26 mars 2017 ne sera plus organisé. En effet, A.S.O. et la ville de Porto-Vecchio n'ont pas renouvelé leur accord pour l'organisation de cette course autour de cette ville en Corse. Par ailleurs, comme A.S.O. a constaté que le peloton se présentant au départ avait tendance à perdre de plus en plus en densité, compte tenu du nombre d'épreuves se déroulant à cette époque de la saison, l'organisateur n'a pas cherché à l'organiser ailleurs en France.


UPDATE 8 décembre 2016 : selon CyclingNews les organisateurs auraient finalement accepté la position de l'UCI pour remettre leur décision concernant 2017 en cause pour l'instant, afin de faire une demande officielle auprès du Conseil du Cyclisme Professionnel.

door Thomas Vergouwen
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5 commentaires | 10035 vues

cette publication est référencée dans : UCI ProTour | Tour de France | Vuelta a España | Giro d Italia | Classiques

Commentaires

Il y a actuellement 5 commentaires !
  1. Bonsoir Thomas,

    Très bon article et bonne idée de citer des directeurs sportifs qui ne sont pas contre une telle évolution !
    Par contre Lefévère, pour un DS d'une équipe spécialisée dans les classiques, ces propos sont risibles : qu'a-t-il contre les petites routes usées ou les chemins de terre ? Que souhaite-t-il ? Avoir 15 coureurs pour contrôler une course toute plate sur une autoroute histoire de faire gagner son sprinteur fétiche ?
    Autre critique, envers Vaughters cette fois-ci, qui critique l'annonce tardive, mais l'UCI vient tout juste d'annoncer la création d'une nouvelle course en Chine pour octobre prochain, et obligatoire pour chaque équipe world tour... Les organisateurs s'y prennent plus en avance.

    Sinon, perso, je pense que cette réforme puisse être une bonne idée pour l'animation. Je ne regarde presque plus les courses à la télé (hormis le giro et les classiques pavées), sauf les arrivées, puisqu'il n'y a plus rien à regarder !!! On s'ennuie ferme et on est mieux à faire soit-même du vélo dans ce cas là !
    Par contre, peut-être que passer à 7 coureurs sur un GT permettrait davantage ce spectacle qui manque tant avec une impossibilité de contrôler la course de bout en bout.
    En tout cas, c'est une bonne chose, et les organisateurs ont bien compris que si le spectacle n'est plus au bout, plus personne ne s'intéressa aux courses et que le cyclisme risque tout simplement de couler.

    | Aurélien M. | samedi 03 décembre 2016 om 19h15

  2. Dommage la disparition du Critérium International. Elle était un épreuve prestigieuse et serieuese. Pas comme tant d'autres qui continuent partout... dans le "nouveau' monde du cyclisme....

    | Francisco | samedi 03 décembre 2016 om 19h20

  3. You could reduce the number of riders per team to one and you will still have accidents with the addition of road furniture, dangerous narrow roads and 90 degree turns near the finish. The reduction of the riders is not the answer. Reduction of the overly dangerous elements on the roads is the answer. When these courses are setup there should be several cyclists who have the ability to veto anything they see as dangerous. No cyclists on the Committee, then it is an automatic "No" to that course!

    | George Schneider | lundi 05 décembre 2016 om 01h01

  4. @ George,

    Les organisateurs n'ont rien à voir avec les aménagements routiers : ils n'y peuvent rien si les hommes politiques construisent des ronds-points partout, rétrécissent la chaussée, rétablissement les tramways...
    Les organisateurs des courses doivent faire à partir de ses contraintes, sinon ils ne pourront plus franchir le moindre village !

    | Aurélien M. | mardi 06 décembre 2016 om 08h38

  5. Bonjour.

    Comment ne pas etre d'accord avec Aurélien face à l'attitude de Patrick Lefevere ?
    Cela me remet en mémoire les attitudes de ce dernier en 2014.
    Sur le Giro et l'étape du Val Martello qu'il aurait voulu faire annuler (Uran son leader était en rose ...) sous prétexte que Stelvio et Gavia étaient dangereux.
    Un mois plus tard, début de Tour,il stigmatisa ASO pour avoir supprimé deux zones pavées dans la fameuse étape d'Aremberg.
    Sauf qu'il est difficile de croire qu'un DS n'avait pas connaissance du communiqué officiel de depart de l'équipe dirigeante d'Issy les Moulineaux indiquant que ces secteurs étaient "sous eaux" !

    Donc, oui à une réduction des effectifs à 8 par GT.

    Cette mesure sera-t-elle suffisante ?
    Je croise les doigts ... mais la coupler avec une limitation des oreillettes aux infos courses serait un "plus de plus".

    Aurélien a mille fois raison de pointer le manque d'animation "stratégique" sur une majorité de courses construites pour favoriser les controles avant un final plus ou moins explosif.

    La question est ?
    Quel serait le déroulement de courses comme LBL, le "Ronde" (meme si Sagan-2016 fut un grand cru), l'Amstel, ou la Flèche, sur des parcours à l'ancienne ?
    Quid pour des étapes (notamment de haute montagne) du Tour ?
    Qui n'essaie rien n'a rien !
    Au vécu de la course olympique (sans oreillette et six coureurs par nation), et d'un Giro di Lombardia qui ne concentrait pas les grosses difficulties tout à la fin, j'entretiens l'espoir de courses différentes avec des tracés plus audacieux, oserais-je : "à l'ancienne" !
    Meme constat sur bases des grandes étapes de montagne du Tour d'Italie 2016 vers Corvara, Risoul, et Santa Anna di Vinadio.

    Le cyclisme ne peut se permettre de "speculer" uniquement sur un maximum de suspense pour retenir le téléspectateur amateur de vélo quand d'autres sports offrent un spectacle "total".

    Bel article, Thomas.

    Ciao.


    | André | mardi 06 décembre 2016 om 09h24

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